L’orgue symphonique

Lors des restaurations du XIXe siècle, le facteur d’orgues Aristide Cavaillé-Coll réalise en 1867 un orgue symphonique exceptionnel muni de 86 jeux répartis sur 5 claviers de 56 notes et un pédalier de 30 notes. Le tout est doté d’un système de double registration pneumatique.

Une grande restauration

Sur le chantier de restauration de la cathédrale, les dépenses en architecture absorbent tous les crédits. Toutefois l’architecte Viollet-Le-Duc demande à Aristide Cavaillé-Coll un devis pour « un instrument digne d’une cathédrale ». Le projet de 1860, chiffré à 115 000francs suscite polémiques et intrigues. Un contre-devis adressé par les établissements germano flamands Merklin-Schutze en 1862 attise plus encore les tensions et positions politiques. Pour voir le projet aboutir, une pétition en faveur Cavaillé-Coll est adressée au Ministre avec pour signataires Berlioz, Rossini, et d’autres illustres musiciens. Finalement Cavaillé-Coll reçoit la commande en 1863.

Le programme initial prévoit de conserver les deux buffets. Le projet de 4 claviers et pédale s’articule ainsi : Positif de dos (56 notes avec 15 jeux), grand-orgue (56 notes avec 15 jeux), Bombarde de 12 jeux, Récit expressif (56 notes avec 10 jeux) Pédale (30 notes avec 12 jeux).

Pour actionner ce vaste ensemble, Cavaillé-Coll envisage sommiers, soufflerie et mécanique neuves, avec système de moteurs pneumatiques de notre invention. Un vaste atelier est implanté dans la tour sud et les galeries latérales. Quelques mois plus tard, Viollet-Le-Duc décide de supprimer le positif de dos, dont le buffet de style Louis XVI lui semble incongru dans une cathédrale gothique dont il s’emploie à unifier le style. Cavaillé-Coll doit alors revoir tous ses plans. Désengagé du devis d’origine, il laisse libre cours à son génie et conçoit un orgue révolutionnaire de par sa conception, ses plans sonores et ses jeux nouveaux.

Le génie de Cavaillé-Coll

Cavaillé-Coll envisage de déplacer l’orgue plus bas mais Viollet-Le-Duc refuse tout changement d’autant qu’il fait construire une vaste tribune au-dessus de la première travée de la nef. Cavaillé-Coll repense alors entièrement la disposition interne de l’instrument :
– le large espace et la hauteur disponibles entre l’arrière de l’instrument et le mur de la façade lui permet de loger les jeux de Pédale et la boîte expressive du Récit ;
– les Positif et Solo sont disposés sur deux niveaux, le Récit derrière le Grand Orgue
– un clavier de Grand-chœur est disposé comme un Oberwerk au sommet de l’instrument, sous la voûte, ce qui favorise naturellement la propagation du son. Il y place les harmoniques aiguës et une puissante batterie d’anches. Toutes les progressions et les aigus sont positionnés au centre ; les jeux solistes au Récit.

Ses recherches acoustiques le conduisent à établir plusieurs séries complètes d’harmoniques pour enrichir les fondamentales. Le plan est hors du commun avec ses résultantes de 32 pieds au pédalier, de 16 pieds au clavier de Bombarde et de 8 pieds au clavier de Grand-chœur.

L’instrument, achevé en décembre 1867, est joué à Noël, dans le cadre de l’Exposition Universelle. Les éloges rendent hommage à la science de l’habile facteur ainsi qu’à la belle ordonnance et à la parfaite exécution des travaux. L’inauguration en mars 1868 accueille des organistes de renom : Alexis Chauvet, Auguste Durand, César Franck, Alexandre Guilmant, Clément Loret, Camille Saint-Saëns, Charles-Marie Widor.

Le grand orgue de Notre-Dame comprend alors 86 jeux répartis sur 5 claviers de 56 notes et un pédalier de 30 notes. Vingt pédales permettent de commander tirasses, accouplements, octaves graves, appels d’anches, trémolo, pédale d’orage. Enfin l’orgue est doté d’un système de double registration pneumatique commandé par deux séries de six boutons.