Quatrième conférence de Carême 2023 : « Humilité et douceur ne sont pas ce que nous pensons »

 

Texte de la conférence
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Humilité et douceur ne sont pas ce que nous pensons (Mt 11)

Humilité et douceur ?
Pourquoi cet intitulé ?
Ne sommes-nous pas dans l’irréel ?
L’invraisemblable ?
Et quand bien même Dieu susciterait humilité et douceur, les verrons-nous un jour ? Sinon chez des êtres d’exception ?

Effectivement, on peut, de prime abord, percevoir une provocation dans la proposition de cette piste de conversion.
Tout semble converger à l’encontre de l’humilité et de la douceur. Citons quelques marques venant confirmer la difficulté :

1) Humilité et douceur n’ont pas « bonne presse » dans notre monde. Toutes deux sont connotées de faiblesse ou de mièvrerie.
Les mœurs internationales, les usages économiques, la vie sociale, le climat d’insécurité, et même les relations de proximité sont allergiques à ces postures. Si tu es humble et doux, tu manques d’affirmation de toi-même. Tu te feras forcément dévorer.

2) L’actualité quotidienne corrobore ce ressenti. Nous déplorons tous la médiatisation de ce qui fait violence, de ce qui est conflictuel, abrasif, déchirant, corrompu. Nous voyons mal comment la personne humble et douce peut se frayer un chemin dans cette effervescence. Nous regrettons que ne soit pas davantage rendu public le bien qui ne fait pas de bruit. Alors que le bruit ne faisant pas de bien occupe le champ le plus vaste. Si telles sont les proportions d’images, entre violence et douceur, nous finissons par douter de la fréquence d’actes positifs et créateurs de paix. Cette pente est vite descendue.

3) Les sciences humaines viennent aussi étayer la présentation de la personne comme n’étant pas spontanément irénique. Sans entrer ici dans le détail des diagnostics, quelque chose en l’homme est pulsionnel et générateur d’une symbolique victimaire ou autrice de violences.

4) C’est peu dire que les religions s’avèrent mal placées pour promouvoir l’humilité et la douceur, que leur comportement, dans l’histoire ancienne ou l’actualité plus récente, contredit ou contrefait. Aucune des grandes religions ou philosophies religieuses n’est indemne de ce procès à charge. Les récits bibliques, pour ne prendre que nos sources, sont souvent décryptés à l’aune de la violence qui est en l’homme. On y scrute la colère divine, fûut-ce pour dire qu’elle ne dure qu’un moment. Aucun récit majeur des religions n’est exempt de passage au crible de la violence en ses contenus.

5) Ajoutons à ces éléments, que l’humilité et la douceur peuvent être des habits de lumière revêtus par les desseins les plus pervers. Il n’est qu’à entendre sur quels désastres psycho-spirituels se sont modélisés de faux visages de la douceur et de l’humilité.

6) Plaçons-nous quelques instants en dialogue avec les professions exposées à la gestion des tensions collectives. L’écoute psychologique et spirituelle de ces personnels du soin, de la sécurité, de l’éducation est éloquente.

7) Étant donnée la marginalisation de la douceur et de l’humilité dans l’espace social, on en vient à se demander si elles sont des catégories ultra sophistiquées de techniques mentales réservées à quelques héros exemplaires. Pour dire cela autrement, les rechercher relèverait presque du luxe ou de l’ésotérisme.

Venez voir comment je vis, et dites-moi où sont humilité et douceur.

Le propos que je tiens depuis quelques minutes nous amène-t-il à constater que le monde ne peut être doux et humble ?
Un manichéisme pourrait très vite nous faire tirer cette conclusion.
Ce serait ignorer toute la littérature qui se fit chercheuse, avant le christianisme, de l’humilité et de la douceur.
Ce serait être injustement sourds aux accents culturels qui traversent les siècles et scrutent le mystère de l’homme.
Ce serait mépriser les civilisations dans leur essence.
Ce serait manquer d’encouragement envers ceux qui déploient aujourd’hui la relation non violente et la médiation. Merci à eux !

La potentialité qui est en l’homme doit sans cesse être considérée, quand il construit des passerelles entre personnes et entre nations.
Il est cependant exact que le paradigme de l’humanité est rarement celui de l’humilité et la douceur.
Tout est conçu sur la réussite, la compétitivité.
Sans me substituer aux philosophes ou sociologues, il y a une polémologie en actes.
Elle est inhérente à l’histoire.
Elle est constitutive de l’homme.
Nous pensions nous être immunisés de toute guerre en Europe, du fait de l’exemplarité de nos ainés dans leur résistance à la haine.
Nous pensions, dans la Covid, trouver un virus à combattre simplement par les armes sanitaires.
Or, nous sommes sidérés de ce que l’humain peut être enclin à devenir, ou redevenir belliqueux et meurtrier.
Nous connaissons une guerre à nos portes, chaque jour en passe de se mondialiser.
Nous découvrons un profil psychiatrique de l’homme terriblement abîmé par la Covid.
Ce n’est pas en nous réfugiant dans le déni que nous affrontons ce réel.
Le psychiatre Gérard Haddad dit clairement :
« Les puissants qui dirigent le monde avec cynisme, abhorrent par-dessus tout le constat de leur impuissance. Ils possèdent, hélas, le moyen de la masquer ».
Cet analyste de la violence qui est en l’homme, est très suggestif quand il montre comment la mondialisation aseptise la méfiance et la haine, mais ne la résout pas.

Dieu qui connaît l’homme mieux que lui-même n’est guère surpris quand le dialogue s’entreprend avec Lui.
Salomon, par exemple, lui demande un cœur écoutant, un cœur capable de discerner.
Salomon se sent impuissant devant un peuple si difficile à gouverner.
Dieu se réjouit de la demande de Salomon.
Mais il lui dit :
« Tu aurais pu me demander pour toi, de longues années, la richesse ou la mort de tes ennemis. Tu as simplement demandé de savoir bien juger pour gouverner avec justice » 1 Rois 3,11

Dieu lui-même se surprendrait-Il à offrir à Salomon ce qu’il n’a pas demandé ?
La réponse venant de Lui n’est jamais réductrice. Dieu est plus grand que notre cœur : « Puisque tu as demandé ce cœur qui écoute et que tu n’as pas demandé pour toi une longue vie ; que tu n’as pas demandé pour toi la richesse, et que tu n’as pas demandé la mort de tes ennemis,
voici j’agis selon tes paroles ! Je te donne un cœur sage et perspicace de telle sorte qu’il n’y a eu personne comme toi avant toi et qu’après toi, il n’y aura personne comme toi.
Même ce que tu n’as pas demandé, je te le donne : et la richesse et la gloire, de telle sorte que, durant toute ta vie, il n’y aura personne comme toi parmi les rois ».
Offrir ce cœur écoutant à Salomon n’est pas le doter d’une assurance tous risques.
L’aventure spirituelle ne fait que commencer.
La liberté du Roi s’exercera en lignes courbes. Dieu sait ce qu’il y a en l’homme.
Il offre avec largesse ce qui peut déployer en nous la capacité aimante et discernante.
Il ne prodigue surtout pas la demande instinctuelle de l’homme voulant la mort.
Il l’invite à choisir la vie.
Il n’est donc pas surprenant que la douceur apparaisse souvent dans l’histoire de l’humanité comme le perce- neige.
Expression de l’homme quand toute sauvagerie semble l’envahir, la douceur prophétique.
Expression de l’homme quand toute désespérance peut le ronger : la douceur réconfortante.
Prenons deux exemples :
Étienne de Montety vient d’écrire un roman remarquable intitulé « La douceur ». Récit plaçant la mémoire d’une survivante de Ravensbrück. La souffrance, les amitiés. Le corps et le psychisme qui perdent leur tendresse. La violence et les cendres. Et le souvenir de cette rose cueillie. Éclat dans l’horreur funeste. La beauté au milieu de la monstruosité. Chez cette rescapée, le désir de transmettre la percée inouïe de cette douceur.
Écoutons maintenant Maurice Bellet. L’épreuve dont il parle est la sienne sur un lit d’hôpital.

Rude épreuve !
Il la qualifie de kafkaïenne.
C’est peu dire.
Écoutons quelques bribes de son récit :
« Je plie sous le vent noir. Passage à vide. Lacs d’amertume. Tristesse qui remonte des fonds oubliés. Pas de honte de ce que je subis. Ceux qui ont du courage ont bien de la chance.
Il y a des hauts et des bas. Je ne maîtrise pas ce mouvement de houle.
Taisez-vous, vous qui croyez que la volonté peut tout. Je suis humilié au plus concret de moi »
Alors, comment Maurice Bellet peut-il parler de la « divine douceur » ?
Il la rencontre dans des témoignages précis de compassion à son égard.
Il la découvre à la fois très incarnée et toujours plus grande que ce dont les gens sont le relais.
« Elle est présence, hospitalité, parole échangée. Elle est l’amour au-delà de l’amour, car elle ne cherche aucune possession. »
Pourquoi divine ? interroge Maurice Bellet
« Divine parce qu’elle ne serait pas humaine ? C’est tout l’inverse ! Elle est divine d’être humaine, entièrement humaine en vérité ».
Nous avons commencé notre intervention dans la perplexité qu’une douceur puisse émaner de nos logiciels. Les derniers éléments de l’actualité corroborent cette impuissance. Quand ce n’est pas la drogue, c’est l’orgueil de la guerre qui rend méconnaissable le visage humain qui devrait être icône de douceur. Il faut sans doute faire expérience du manque pour expérimenter d’où viennent l’humilité et la douceur. Maurice Bellet dira :
« Dieu, c’est le plus humain de l’homme, au sens d’être le don par excellence, principe vivant de la divine douceur ».
Maurice Bellet précise une dimension qui est attestation que Dieu fait du neuf par nous, au-delà de nous, en nous, à l’insu de nous :
« L’évangile est la divine douceur elle-même ; non au sens mièvre et doucereux ; mais le sang vif de la vie communiquée. Le grand souffle nouveau qui est l’amour ».
Chers amis, voulons-nous être donneurs de ce sang vif ?
Vous qui écoutez ces conférences depuis un lit de souffrance, une solitude, une rencontre familiale, un transport en voiture, une réunion communautaire, dans les étreintes de la fraternité ou les angoisses du lendemain, lors d’un moment en podcast, vous avez chacune, chacun, une perception de ce qui est rude. Et ne facilite pas, l’accueil de la béatitude de douceur. Et une expérience de l’humiliation, l’humiliation si multiforme, l’humiliation, mystère de la croix. Passage obligé et si controversé vers l’humilité.

Un évangile de prédilection de François de Sales est Mathieu 11,29 :
« Prenez sur vous mon joug. Devenez mes disciples. Car je suis doux et humble de cœur ! »
Toutes les traductions sont une constellation : Mettez-vous à mon école. Apprenez de moi. Devenez mes disciples.
Nous sommes présentés par Mathieu comme de perpétuels apprentis de la douceur et de l’humilité.
Elles ne sont pas innées.
Elles ne s’acquièrent pas une fois pour toutes.
Elles sont l’être même du disciple.
Il prend sur lui son joug.
Il apprend de lui, non des notions.
Il apprend, qui il est.

Écrivant à une de ses accompagnées, François de Sales se fait catéchiste de cette humilité et de cette douceur : « Souvenez-vous de la leçon principale, laquelle Jésus nous a laissés en trois mots. Afin que nous ne l’oubliions jamais, et que cent fois par jour nous la puissions répéter. Apprenez de moi que je suis doux et humble de cœur ».
François de Sales en tire une synthèse : « C’est tout en somme d’avoir le cœur doux à l’endroit du prochain, et humble à l’endroit de son Dieu ».
Celui qui sera proclamé Docteur de l’Eglise, tire de l’être même du Christ que nous soyons doux, une de ses qualités envers le frère ; humble, une autre qualité envers Dieu.
La proposition, pour être didactique, n’en est pas moins un perpétuel travail sur soi. « Donnez à tout moment ce cœur à notre Sauveur.
Faites que ce soit le cœur de votre cœur ».
Trois mots. Redits cent fois. Comme une recherche inlassable et confiante.

Si j’ai fait le choix de ce thème dans un cycle de Carême sur la nouveauté, c’est parce qu’humilité et douceur sont une voie de conversion décisive pour nos vies baptismales, pour une écologie intégrale, pour une synodalité fécondée par l’Esprit, pour la justice et la paix dans le monde si fragmenté.
Dom André Louf, qui fut abbé du Mont -des -Cats, voit dans l’humilité le fondement de la foi chrétienne, la « componction » en étant l’expression, terme un peu technique signifiant le « cœur totalement brisé ».
Conjointement à ce cœur brisé, Vatican II parlera de la douceur en Dei Verbum : « L’Esprit Saint donne la douce joie de consentir et de croire à la vérité » N°5
Le même mouvement de consentement est décrit de part et d’autre.
La volonté humaine, quoique pleinement sollicitée, ne peut suffire.
Le Christ est doux et humble de cœur.
Le disciple n’achève jamais cette recherche.
Augustin dira à juste titre que l’humilité résume toute la discipline chrétienne.
Mais cette douceur n’est jamais acquise… Et l’humilité authentique se fonde sur l’obéissance du Christ.
Ces fondamentaux nous rappellent l’aiguillon de la vanité et le narcissisme désastreux.

Les abus et les emprises dans la société et l’Eglise nous rappellent que les plus vertueuses attitudes peuvent se draper d’habits de lumière.
Nietzsche avait fustigé l’humilité comme grand mensonge des faibles.
Freud avait perçu dans la fausse humilité la variante masochiste du complexe de culpabilité.
Adler la trouvait similaire au sentiment d’infériorité.
Chacun de nous a lu ces thèses. Et leur a accordé intérêt ou mépris, selon son angle de vision et son expérience.
Leur partialité et leur grande limite épistémologique ne devraient cependant pas faire oublier qu’elles étaient de réels clignotants.
Nous nous sommes crus prémunis de ces diagnostics parce que nous devenions une Église davantage désireuse d’être humble et servante.
Beaucoup écrivent en ce moment, dans les consultations synodales, leur aspiration à une Église plus simple, plus proche.
Comment ne pas faire chorus à l’intention ?
À la condition toutefois de recevoir cette humilité du Christ !

Un apophtegme du désert affirme :
« Je préfère un échec supporté humblement à une victoire obtenue avec orgueil ».
« Croire qu’on n’est pas orgueilleux est la plus claire manifestation qu’on l’est » écrit Saint Jean Climaque

Rentrant chez vous ce soir, emportez ce triptyque :
1) Le sacrifice qui plait à Dieu est un esprit brisé. Psaume 50,19
2) La douceur est une béatitude qui nous place à la fois au dedans de nous, et en plein monde
3) Sans conversion et sans ascèse, pas d’humilité :
Ces trois dimensions sont à cultiver en synergie de nos esprits et de nos cœurs.
Pas l’une sans les deux autres !

Dans le Livre du Siracide, le Seigneur a renversé le trône des puissants, et fait asseoir à leur place les doux (Si 10,14).
« Heureux les doux, ils obtiendront la terre » est la béatitude (Mt5, 4).
Nous notons ici que cette béatitude n’est pas seulement une transformation de leur être comme celle de la consolation ou du rassasiement. Ici la douceur va posséder la terre, rayonner sur elle !
Comment est-il possible d’annoncer ce renversement des choses ?
Dans cette perspective, on n’agit pas avec un esprit de douceur (Ga 6,1) sans se recommander par la douceur du Christ (2 Co 10) selon l’expression de Paul.
Rendre compte de notre espérance est une nécessité, mais le faire avec douceur et respect (1, P 3,16).
Il y a bien une urgence à promouvoir humilité et douceur dans le monde et au sein de l’Egllse.
Dieu fait du neuf, ouvrons les yeux !
Je citerai simplement celles et ceux qui travaillent à adoucir tout ce qui est tension exacerbée. Soit entre les personnes, soit dans l’espace public.
Je citerais aussi celles et ceux qui vont au chevet des personnes qui n’ont plus figure humaine.
Ces deux attitudes n’ont en soi aucune rentabilité.
Elles sont pure gratuité, gratuité telle que Benoît XVI en parlait dans son encyclique sociale.
La douceur et l’humilité sont ces actrices discrètes qui posent un baume sur les plaies, les rancœurs.
Comme l’écrit Agata Zielinski, il y a une telle violence à signifier à quelqu’un son inutilité.
La violence, qu’elle soit gangrenée ou passée à l’acte, appelle de notre part un sursaut éthique, un surcroît d’humanité, un supplément d’âme.
Depuis que nous échangeons, il devient lumineux que la douceur et l’humilité sont deux sœurs s’appelant l’une l’autre, se fécondant l’une l’autre.
Regardons le concret de nos vies :
Une humilité qui n’est pas vécue dans le consentement intérieur n’est pas encore humilité.
Une douceur qui serait empreinte de vanité et de superbe ne ressemblerait pas à la douceur évangélique.
Contrairement à toutes les images d’Epinal, la douceur et l’humilité sont des vertus qui sollicitent une énergie inouïe, et rendent forts ceux qui sont humbles et doux.
Oui, il faut de la trempe intérieure, il faut de la persévérance et de l’abandon pour grandir en humilité et douceur.
Celui qui accepte l’apprentissage est comme dans l’entraînement du sportif.
Les compétitions ne se préparent jamais, sans l’abnégation des exercices sur soi.
Les rendez-vous de la vie ne sont pas des projections imaginaires.
Douceur et humilité sont des défis chaque quart d’heure.
François de Sales ne se fait pas chantre de la douceur et de l’humilité parce qu’elles seraient innées en lui.
Ses biographes décrivent tout le travail humain sur lui-même et toute la réception spirituelle par lui, afin de devenir humble et doux.
Sa notoriété savoyarde ne faisant que déborder le duché de Savoie, l’excellence de ses facultés auraient pu générer en lui une très haute idée de lui-même.
La pression des provocations et sollicitations aurait pu le rendre agressif et vindicatif.
François de Sales sait qu’on peut détruire, en quelques secondes de violence, la douceur que l’on met vingt ans à chercher en son cœur.
Il connaît aussi les échelles d’humilité héritées de la tradition spirituelle.

Chers amis, quel que soit notre âge, ce travail sur nous-mêmes dans l’invocation de l’Esprit ne fait que commencer.
Je dirais même que son urgence s’accroît, car toute une vie systémique nous fait contourner le défi de l’humilité et de la douceur.
La société a cette étonnante et funeste capacité à rendre artificielle la juste connaissance de soi. Isabelle Le Bourgeois, religieuse auxiliatrice et psychanalyste, note « ce si long chemin qui permet d’avoir accès à la vérité sur soi-même ». Il est vrai, comme elle le souligne, que notre « système défensif est encore le plus fort ».

Notre recherche inlassable de l’humilité et de la douceur nous situe sur une ligne de crête. L’épître aux Galates est éclairante. Nous pouvons très vite être enclins à « nous mordre les uns les autres, nous détruire les uns les autres » (Galates 5,15).
Il y a en nous un affrontement entre les tendances de la chair et les tendances de l’Esprit.
L’humilité et la douceur ne sont pas des surgissements éthérés. Le fruit de l’Esprit, dit Paul, est « amour, joie, paix, patience, bonté, bienveillance, fidélité, douceur et maîtrise de soi » (5,22).

Vous avez bien entendu la concomitance de la douceur et de la maîtrise de soi. C’est ainsi qu’est LE fruit. Le fruit est constellation, il est convergence d’attitudes intérieures et d’actions prophétiques. La douceur et l’humilité ne sont donc pas des postures optionnelles. Tout est lié !
L’humilité et la douceur sont à la fois données et à travailler sans cesse.
Dieu fait toutes choses nouvelles ! Il le dit depuis le début de sa Révélation. « Ce n’est point l’holocauste du petit bétail qui est désiré par Lui ». Il cherche à frayer un chemin à sa grâce dans nos déserts arides.
Soyons humbles et ne nous perdons pas à dire « Je suis humble. Devenons-le davantage encore !
François de Sales dit : « Soyons ce que Dieu veut, et soyons le bien ! ».

Petit conseil pratique : dans les jours à venir, relisez dans votre mémoire et votre prière, avec vos proches un événement où la douceur a vaincu les tensions. Un événement où tout aurait pu être rancœur et violence. Un événement où quelque chose de l’humilité et de la douceur ont marqué une avancée. Que s’est-il passé permettant de ressentir de façon tangible : « Heureux les doux » ?
En quoi cette humilité et cette douceur ont-elles suscité du neuf ?
Pourquoi voulez-vous en rendre grâce ?
Répétez souvent cet exercice. Il vous donnera une vision nouvelle.
« Le nourrisson s’amusera sur le nid du cobra. Sur le trou de la vipère, l’enfant étendra la main » Isaïe 11.
Macaire, père du désert disait : « Si en reprenant quelqu’un, tu te laisses emporter par la colère, tu satisfais ta propre passion.
Ne te perds donc pas toi-même pour sauver autrui ».
Ne nous résignons pas à ce que la terre soit submergée de sombres perspectives. Les doux posséderont la terre. Nous avons aujourd’hui pour aimer !19